Le Conseil d’analyse économique (qui se présente comme un organe de réflexion indépendant placé auprès du Premier ministre) vient de rendre publique un communiqué de presse et une note (p. 1-15) dans laquelle il fait « des propositions pour repenser la stratégie d’investissement dans l’enseignement supérieur pour gagner en efficience et en équité. Un investissement supplémentaire est indispensable pour améliorer la qualité des formations et le taux de réussite dans les formations universitaires de licence et master, tandis que la création de places supplémentaires, la revalorisation et l’extension des bourses et l’accroissement de l’offre de logements permettraient d’améliorer l’accès à l’enseignement supérieur des élèves les plus modestes ».

Trois annexes associées au rapport apportent des informations et/ou des recommandations importantes sur i) les coûts des formations dans l’enseignement supérieur français (p. 16-36), ii) les salaires associés aux diplômes (p. 37-64) et iii) l’accès inégal à l’université selon le revenu des parents (p. 65-78). Leurs conclusions sont les suivantes :

Sur le coût des formations :

  • « Les dépenses relatives à l’enseignement supérieur en France, sans être en complet décrochage vis‐à‐vis de ses voisins européens, s’avèrent être insuffisantes, en perte de vitesse par rapport aux évolutions à venir, notamment en termes de nombre d’étudiants qui accéderont à l’enseignement supérieur ».
  • Cette dépense est « inégalement répartie selon les formations » et les disparités sont importantes : « alors que les formations CPGE et STS dépassent les 10 000 euros annuels par étudiant, le coût moyen d’une licence peine à dépasser les 4 000 euros ».
  • « C’est le format des formations qui explique les disparités de coût : de faibles taux d’encadrement et un nombre d’heures réduit tirent mécaniquement les coûts vers le bas dans les formations en sciences humaines et sociales, et expliquent le coût élevé des formations scientifiques qui ont souvent lieu en petit groupe, bien au‐delà des questions de matériel de recherche ».

Sur le niveau de salaire associé aux diplômes :

  • « Les diplômes de l’enseignement supérieur demeurent très fortement associés à un revenu du travail plus élevé que les diplômes du secondaire ».
  • Il existe « une hiérarchie très marquée des revenus en fonction des diplômes du supérieur. Ainsi, à expérience et origine sociale égale et une fois que l’on contrôle pour les effets du genre, les détenteurs d’un diplôme de niveau Bac +2 ou Bac +3 gagnent en moyenne 20 % de plus que les titulaires du seul baccalauréat, et les titulaires d’un diplôme de niveau Bac +5 ou plus gagnent en moyenne entre 50 et 65 % de plus selon les spécifications.
  • « De fortes différences sont cependant notables en fonction des spécialités des diplômes considérés, avec un surplus très net des formations dans les domaines de l’ingénierie, des mathématiques et des sciences et techniques de l’information et de la communication, quel que soit le niveau de diplôme ».
  • « Ces rendements positifs des diplômes ne semblent pas avoir été fortement affectés par la massification de l’accès à l’enseignement supérieur observé durant les dernières décennies ».

Sur l’accès inégal à l’université selon le revenu des parents :

  • Il existe « de fortes inégalités d'accès à l'enseignement supérieur selon le revenu parental en France. Leur ampleur est légèrement plus faible, mais globalement comparable à celle des inégalités américaines ».
  • Elles contribuent « vraisemblablement à expliquer le faible niveau de mobilité sociale en France ».
  • « Ces inégalités d’accès donnent lieu « à de considérables différences d’investissement en capital humain selon le revenu des parents ».
  • « Pour y remédier, de nouvelles politiques publiques au bénéfice des jeunes dont les parents sont les moins aisés semblent nécessaires. Elles devraient parvenir à concilier un soutien précoce des compétences scolaires, une aide à l’orientation et une meilleure information sur les parcours et leurs débouchés pour éviter l’autocensure, ainsi qu’un soutien financier plus important permettant d’inciter à la poursuite d’études et de couvrir les dépenses liées à la vie étudiante ».